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Article mis à jour le 21.03.2021

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Le Permacooltour : journal d'un tour de France des écolieux à vélo

Halte pour trois semaines de WWOOF à la Ferme d'un "oasis", le Hameau des Buis. Lui c'est Kevin à la photo, moi c'est Timothée jongleur de mots, deux des avencurieux du Permacooltour, notre collectif à vélo qui pédale à la rencontre de lieux inspirants.

Côté four

Au commencement, il y avait la terre, l’eau, le feu et l’air… et de cette alchimie l’Humain créa le pain, le cinquième élément, celui du vivre-ensemble, symbole de l’amitié liant les co-pains qui le partagent. A peine arrivé·e·s, nous rencontrons le couple boulanger Arnaud & Anaïs qui nous invitent à vivre quelques heures au cœur de leur univers. Se lever avant l’aube, traverser la brume matinale jusqu’au fournil encore chaud de la veille, enfourner les premiers croissants façonnés à la main, puis cueillis dorés par pépé-Jean en robe de chambre aux premières lueurs du jour.

« Tu fais du pain pour tes ami·e·s alors qu’ils sont encore au lit, c’est ça le charme du métier ! »

Arnaud, du Hameau des Buis

Faire du pain est une véritable expérience sensorielle qui facilite le réveil de soi par celui de nos sens : comprendre par le toucher la nature d’une pâte en évaluant son élasticité, sa force et sa ténacité ; goûter par les narines les saveurs d’une farine et la comparer à ses voisines ; bouler, tourner, façonner les pâtons un à un d’un geste souple et franc, grigner la peau du pain d’un trait d’esprit, tourner la sole en pierre du four massif, lui ouvrir sa grande gueule pour enfourner des gros bâtards… et constater avec humour la violence de cette chute littéraire.

Côté jardin

Un peu de poésie dans ce monde de brutes, bon sang… allons plutôt voir côté jardin si j’y suis. Banco ! j’y suis, et je n’y suis pas seul. Sous mes yeux s’éveillent une faune et une flore éblouissante : le paon se vante haut et fort en déployant son éventail de couleurs, à l’orée de mon tympan fredonnent les abeilles sauvages qui se régalent du nectar sucré des amandiers en fleur, les touristes ailés se bousculent à l’entrée des hôtels à insectes, les pissenlits et la bourrache exposent leurs plus beaux boutons qui fondent dans notre pesto sauvage et sur notre langue, les oiseaux piaillent en canon suivant leurs propres partitions, le sol se réchauffe doucement grâce au soleil qui le recouvre chaque jour d’une plus foisonnante couverdure d’herbes sauvages… Bref, le printemps toque à la porte du Hameau des Buis, et je prends le temps d’aller à sa rencontre.

Car à la Maraiverie, le wwoofing floute la frontière entre travail et loisir, comme en témoigne Amaury, ex-wwoofer aujourd’hui maraîcher du hameau à 27 ans:

« J’ai gardé la mentalité du wwoofing : toujours découvrir, être dans le partage. Je préfère quelqu’un qui me dit qu’il préfère se balader ce matin plutôt qu’un autre qui vient à contre-cœur parce qu’il doit faire ses 4 heures quotidiennes. »

Si l’ambiguïté du statut de WWOOFer crée de la confusion dans le monde agricole, Amaury « soutiens l’association WWOOF parce qu’elle apporte un cadre, avec la charte des valeurs et un suivi si ça se passe mal. » Moi-même ayant eu une expérience déplaisante il y a quelques années et que j’avais signalée par un commentaire sur le site, j’ai constaté le professionnalisme et la rigueur de l’association, qui a fait les démarches de suivi nécessaires pour comprendre les ressorts de mon expérience et éviter qu’elle ne se reproduise avec d'autres.

Sans la pression d’un patron, la curiosité et l’enthousiasme deviennent alors les meilleurs moteurs pour découvrir les métiers de la terre, même si à la Maraiverie on privilégie les outils manuels, les discussions ou le silence aux machines motorisées assourdissantes.

Naître et renaître au milieu des chèvres

Pour les amateur·ices de calme et de silence, « la balade des chèvres tous les matins peut être vécue comme une retraite psychologique et spirituelle », poursuit Amaury. A ses côtés, la chevrière Mélanie explique :

« Beaucoup de wwoofers prennent de grandes décisions dans leur vie pendant ce mois au milieu des chèvres et des bois. La copine de l’ancien maraîcher était wwoofeuse à l’époque, et lui-même était wwoofer avant elle… avec les chèvres d’ailleurs. C’est aussi une manière d’intégrer un collectif, et de voir comment on y vit »

D’une immersion d’un mois peut naître la vocation d’une vie… ou naître quarante chevreaux lors de notre séjour ! Certaines chèvres mettent bas au chaud dans la chèvrerie, d’autres au cours d’une balade matinale entre deux genévriers, mais toujours avec une confiance étonnante sous nos yeux ébahis. Et puis c’est le festival dans l’enclos, je jongle avec trois chevreaux qui sautent et se superposent les uns sur les autres ; un autre vient me croquer le museau en me faisant loucher tandis qu’un cinquième bêle à tue-tête pour me téter le bout des doigts… c’en est fini de moi, je cède devant tant de tendresse.

Avant de me faire dévorer tout cru, je vais rejoindre mes compagnons de route Kamil et Alexis, et ensemble nous nous dirigeons vers le jardin-maraîcher pour y enraciner deux des cent arbres que nous planterons durant notre tour de France. Un grenadier et un figuier marqueront le passage du Permacooltour au hameau. Nous laissons derrière nous une empreinte écologique vertueuse, celle dont a plus que jamais besoin notre Terre nourricière. Et si ces jeunes arbres trouvent leur place dans l’écosystème des Buis, peut-être reviendrons-nous dans quelques années pour les tailler comme nous l’avons appris.


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