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Article mis à jour le 12.02.2025

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“ Utiliser mes mains pour autre chose que taper sur un clavier."

Tous, ils ont passé des journées entières assis face à un écran avant de rependre possession de leur vies. Pendant quelques jours, Candice partage la vie à la ferme de Thomas, maraîcher-transformateur et de Ariane, paysanne-boulangère. Il y a beaucoup à faire et à ré-apprendre. Mais être ensemble ça porte.

Il faut zigzaguer entre prés et bocages pour atteindre la ferme en construction de Thomas et Ariane dans le Calvados. © Cloe Harent
Le projet est celui de produire non seulement pour nourrir leur famille, mais aussi pour proposer du pain fait par Ariane avec leur propre blé et des bocaux de légumes préparés par Thomas à partir des produits de la ferme ou alentours. © Cloe Harent
Ils rénovent leur ferme depuis trois ans de la façon la plus écologique possible. En attendant, ils habitent un autre bâtiment. Ce n'est pas facile car ils ont une petite Maïa de deux ans dont il faut prendre soin. © Cloe Harent

Candice est en WWOOFing chez Ariane et Thomas. Elle est en train de passer un BPREA (brevet professionnel de responsable d'entreprise agricole) paysanne-boulangère pas loin de la ferme, en Normandie, où elle vit désormais. Car elle a eu une autre vie avant d'arriver ici.
Née en banlieue parisienne, elle a d'abord redoublé d’efforts pour quitter une vie familiale un peu chaotique, et a fini par obtenir un poste élevé dans la Tech avec le confort qui va avec. Oui, mais. Au fil du temps, elle fait l'expérience du fameux proverbe : l'argent ne fait pas le bonheur.
La rencontre avec une illustratrice reconvertie en plantes aromatiques et médicinales lui ouvre soudain d'autres perspectives. Grâce à elle, elle fait la connaissance de l’association Abiosol à Montreuil. Un autre monde s'ouvre. Mais il lui paraît si éloigné d'elle que le pas est difficile à franchir " J'avais beaucoup d'appréhension à faire des stages paysans car je ne me sentais pas légitime . Et puis, j'ai décidé d'essayer quand même, j'avais besoin de respirer !"

"Je complète la théorie de ma formation en fait !"

Après des stages en maraîchage et en boulangerie paysanne, elle enchaîne une dizaine de séjours en WWOOFing. Ils confirment son besoin de quitter la ville, de faire un métier qui a du sens .

Aujourd'hui, son BPREA de paysanne-boulangère lui a donné confiance : " Ça y est, j'ai acquis des compétences pratiques. C'est plus utile pour moi que de faire fructifier les profits des actionnaires. " Retrouver des savoir-faire, utiliser ses mains pour autre chose que taper sur un clavier a redonné du sens. "Je continue à faire du WWOOFing en parallèle de mon diplôme, car je reste dans le concret et je rencontre les personnes qui font déjà ce métier. Je complète la théorie qu'on voit en cours en fait ! "

Ariane et Thomas se sont formés et sont installés en tant que paysans après une première partie de carrière. © Cloe Harent
Candice, venue apprendre en aidant Ariane et Thomas. © Cloe Harent

Explorer les modes de vie alternatifs à la société agro-industrielle, pour construire leur propre projet.

Vivre ensemble permet de faire connaissance en profondeur . Ariane et Thomas racontent leur parcours à Candice.
Avant de démarrer ce projet, Thomas a travaillé dans l’industrie cinématographique : régie, production... Jusqu'à ressentir que cette voie ne lui convenait plus. Il devient photographe indépendant. C'est à l'occasion d'un reportage photo sur les éleveurs de rennes, qu'il commence à rêver de se rapprocher de la nature et de travailler la terre.

Sa rencontre avec Ariane lance le projet : ensemble ils vont commencer par explorer les modes de vie alternatifs à la société agro-industrielle, pour construire ensuite leur propre projet.

Ariane a 38 ans. D’origine franco-japonaise, elle a grandi dans une famille modeste à Paris jusqu’à l’âge de dix ans, avant que l'entreprise familiale décolle et que la famille s'envole pour le Japon. La suite de son parcours est tout tracé : bonnes études, boulot d'ingénieure en France, puis en Allemagne. L'aéronautique. Puis crise de sens, burn-out... Jusqu'à ce documentaire vu par hasard un soir de fatigue : sur la vie d'une femme paysanne-boulangère en Bretagne. La beauté du monde contre son open-space quotidien.

On teste des semences venues du Japon et d'autres fermes qu’ils ont rencontrées pendant leur voyage. © Cloe Harent
Ariane est contente car ils ont réussi à finaliser toutes les planches de semis. © Cloe Harent
On se sent bien dans la serre : les premiers rayons du printemps réchauffent les coeurs et les corps. © Cloe Harent


De retour de leur voyage, chacun se forme . Ariane apprend avec Nicolas Supiot qui, avec sa compagne Laetitia cultivent près de deux-cents variétés de blé qu'ils transforment en farine à la ferme avec un moulin à meule de pierre. Installés en bio et labellisés Nature et Progrès, ils sont heureux. Leur parcours donne à Ariane l'élan pour se lancer en boulange paysanne.

Aujourd'hui, avec Terre de Liens , ils produisent le blé de leurs pains et gèrent leurs semences . Thomas a créé un potager nourricier qui permettra de cuisiner pour la ferme-auberge en construction.

Thomas ramasse les derniers poireaux avant qu’ils ne montent trop. © Cloe Harent
Il a lancé un atelier de légumes lacto-fermentés. © Cloe Harent
Ils ont trouvé une place dans ce petit marché à la ferme qui regroupe pleins de producteurs locaux. Ça se passe dans la ferme d’un des producteurs laitiers.
Ce n'est pas facile de s’intégrer dans une nouvelle région. Mais grâce au réseau bio, ils trouvent peu à peu leur place. En 3 ans, ils ont gagné des clients réguliers.

Cultiver des semences paysannes, faire son propre blé, trier et sélectionner

Ariane explique à Candice les différents mélanges de blés anciens et modernes qu’elle fait pour sa farine. Elle lui apprend aussi comment bien refermer les sacs pour les protéger des souris. C’est un geste très fréquent et important pour un paysan-boulanger.
Elle mélange différents "blés de population". On les appelle "de population" car ils présentent une grande variabilité génétique.
Ariane montre le son du blé. C’est le "déchet" du blé, l’enveloppe de la graine qui est séparée par le moulin. Ils le stockent pour l'utiliser dans les futures toilettes sèches.
Candice demande à bien comprendre comment on calcule les bonnes proportions pour préparer la pâte. Selon les farines, le taux d'humidité change. C'est une science complexe. Candice fait répéter Ariane plusieurs fois pour s'en souvenir.

Pétrir, façonner, chauffer le four, cuire

Il y a parfois des ratés. Là, un mauvais mélange a produit une pâte trop molle. Elles se demandent comment rattraper le coup. © Cloe Harent
Le moment est venu de façonner les pains. Candice divise la pâte en portions exactes pour chaque pain, tandis qu’Ariane façonne les pains. © Cloe Harent
Le rythme s’accélère, la trape du four s’ouvre, Ariane glisse le pain, tourne la plaque, le dépose et referme la porte. La chaleur ambiante augmente. © Cloe Harent
C'est l'heure de défourner. Candice est aux anges, elle aime voir les pains sur les tables en bois, sentir l’odeur du pain et les croutes qui craquent. © Cloe Harent
Chercher du bois pour chauffer le four. Le four métallique à double paroi est plus ergonomique mais différent de ceux que Candice connait. Elle apprécie d’apprendre à s'en servir. © Cloe Harent
Pour atteindre la température voulue, il faut au moins deux heures de chauffe et enfourner au moment où la chaleur commence à descendre, mais il faut vérifier tout le temps que le four est bien alimenté en bois. © Cloe Harent

Thomas, Ariane, la petite Maïa et le chat Rasta

Voir la ferme de Ariane et Thomas

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