Printemps

Article mis à jour le 26.03.2024

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"Préserver la nature et reprendre en main son existence."

J'ai séjourné dans de multiples lieux pour produire un travail sur les pratiques concrètes d'agriculture alternative. Représenter le monde pousse à le regarder en détails. Mes aquarelles sont une forme d'énumération spatiale de tout ce qu'il y avait à voir. Voici quelques traces d'un travail de recherche bien plus approfondi, que ma pratique du WWOOFing, mon intérêt pour l'installation néorurale et pour les questions d'écologie m'ont conduit à mener.


© Jean Autard

Sur cette image, j'ai représenté le chantier de construction d'une yourte. Tout était fait maison, les plans étaient récupérés sur internet et adaptés, on faisait des calculs de trigonométrie sur un morceau de papier. Nous étions deux WWOOFeurs, plus des amis de passage : toute une organisation sociale faite d'entraide et de réseaux informels.

Je me souviens de m'être dit pendant le chantier "plus on est nombreux, moins on travaille" car nous faisions souvent des pauses-café dans la magnifique lumière d'automne.

Pourtant, en quelques jours nous avons réussi à construire un logement confortable pour quelques milliers d'euros. Ce qui est bien sûr sans commune mesure avec le prix d'une entreprise spécialisée !


Dans chacun des lieux que j'ai visités, j'ai découvert un fonctionnement original. Une certaine façon de faire tenir les différents soucis de qualité de vie, de respect de la nature environnante, de diffusion des idées politiques et d'exemplarité. Tout cela à partir de solutions souvent similaires. Des "fermes" aux trajectoires sociales et aux origines différentes mais qui se retrouvent dans la mise en œuvre de pratiques techniques agricoles qui diffèrent radicalement du modèle dominant.


Raisonner en "lieu de vie" plus qu'en maison ou habitation


Malgré la proposition des hôtes de venir me chercher, c’est en autostop que j’avais choisi de franchir la trentaine de kilomètres qui séparaient la gare la plus proche du collectif où je devais me rendre. Après des gorges étroites et spectaculaires, la vallée s’ouvrait sur des paysages ensoleillés de moyenne montagne, encore presque provençaux.

© Jean Autard

Je me trouvais dans un collectif de deux familles. Je me souviens de la présence joyeuse des enfants, de leurs jeux, de leurs rires. On voit que l'espace de vie n'est pas limité à l'intérieur. Là-bas, comme dans de nombreux endroits visités, on raisonne en "lieu de vie" plus qu'en maison ou habitation, tant l'intérieur et l'extérieur s'interpénètrent. L'espace de vie c'est le terrain, avec ses petits intérieurs : la yourte-cuisine, les chambres dans le petit bâtiment en bois, les toilettes sèches...


Le collectif disposait d’un potager vivrier de 1000 m² et menait des activités de cueillette et transformation de plantes aromatiques et médicinales. Sur l'image de dessous, j'ai représenté l'espace potager, protégé des animaux par un enclos fait avec des palettes de récupération. À droite, en jaune, c'est la "Poulotte" : une ancienne roulotte devenue poulailler.

© Jean Autard

Vivre en extérieur en grande proximité avec la nature

© Jean Autard

Accéder à cette ferme perchée dans l'arrière pays niçois, ça se méritait ! À partir du village le plus proche, il fallait 40 min en voiture sur piste, ou bien deux heures de marche à pied par les sentiers. Malgré cet isolement, il y avait du passage, des amis montaient de temps en temps.
On voit sur cette image en haut, une grande cuisine extérieure, avec un petit four. Une grande partie de la vie se faisait en extérieur dans une grande proximité avec la nature. Le couple qui m'accueillait produisait de quoi vivre - des légumes, quelques cochons - mais aussi des oeufs qu'ils vendaient au marché une fois par semaine.


Rendre hospitalier ce petit bout de terrain ingrat

© Jean Autard

Cette ferme perchée à flanc de coteau, appartient à une femme qui vivait seule. Elle avait acheté ce morceau de terrain pour une poignée d'euros et elle avait tout aménagé elle même. J'avais trouvé fascinant de mesurer toute l'énergie qu'elle avait déployé pour rendre hospitalier ce petit bout de terrain ingrat, en pente, en bordure de forêt. Il fallait voir les plans réalisés à la main sur des feuilles doubles à carreau, qui reproduisaient la parcelle remplies de minuscules écritures désignant le nom de chacun des arbres plantés.

La vue sur la vallée dans les Alpes de Haute Provence était à couper le souffle. Du versant où nous nous trouvons, la vallée se déploie sous nos yeux, surmontée de son sommet emblématique, qui, de presque 3000 mètre d’altitude, déploie ses falaises rocheuses et versants enneigés.

Elle avait réussi à mettre en place un début de production agricole de subsistance : on voit bien une terrasse de culture en contrebas. On voit aussi une palette placée pour limiter l'érosion du sol.


"Préserver la nature et reprendre en main ses conditions d'existence."

Doctorant en anthropologie, Jean Autard prépare une thèse sur l’agriculture alternative dans les Alpes du sud. Il évoque ainsi la dimension utopique de ces projets visant autant à préserver la nature qu’à permettre aux personnes qui s’y engagent de reprendre en main leurs conditions d’existence.


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